Giulia Tofana
Giulia Tofana[1] (ou Toffana, Tophana, Thofania) Giulia Mangiardi[2] ; née à Palerme et exécutée à Rome le ) est une courtisane, célèbre pour avoir été une tueuse en série sui generis, dédiée à la cause des femmes piégées dans de mauvais mariages, auxquelles elle fournissait un poison aussi discret qu'efficace, la « Manne de Saint Nicolas de Bari » ou « Aqua Tofana »[3].
Biographie
[modifier | modifier le code]Giulia Tofana était probablement la fille ou la petite-fille de Thofania d'Adamo, apothicaire accusée d'avoir assassiné son mari Francesco et exécutée à Palerme le [4], ce qui explique son apprentissage des connaissances nécessaires pour mettre au point son poison. Mais il n'est pas à exclure que sa mère lui en ait transmis la recette.
Giulia Tofana est décrite comme une belle femme[5], devenue veuve, ayant officié avec sa fille ou sa sœur Girolama Spera et 3 autres femmes.
Elle met au point une « eau d'arsenic », un poison incolore, inodore, insipide et hautement toxique, capable de causer une mort apparemment naturelle en quelques gouttes et en quelques jours. Subtilement, elle conditionne la concoction dans un petit flacon d’huile cosmétique en verre étiqueté « Manne de Saint Nicolas de Bari ». Ainsi le produit se fondait-il parmi les artifices de toilette de toute femme, passant inaperçu parmi maquillage, lotions et parfums.
Après 1633, assez enrichie pour tenter sa chance à Rome à la cour de Philippe IV d'Espagne, elle devient courtisane, s'installe à Rome et vend son élixir à des femmes violentées par leurs maris, mariées de force, ou... ayant l'ambition de devenir veuves[4]. Elle fait aussi des émules, parmi lesquelles la non moins célèbre Marie-Madeleine d'Aubray, marquise de Brinvilliers.
Parmi ces femmes se trouvait la comtesse de Ceri, qui semble-t-il ne respecta pas la posologie recommandée. Son mari survécut à l'empoisonnement. ses soupçons et ceux de ses proches s'éveillèrent. Il saisit les autorités pontificales qui menèrent l'enquête[6]. "Questionnée" comme on savait le faire à cette époque, la gente dame avoua sa maladresse et dénonça celle qui lui avait procuré le poison.
Cependant Giulia Tofana semble avoir été assez estimée dans son milieu, puisqu'elle put trouver refuge dans une église, jusqu'à ce qu'une rumeur se mette à circuler dans Rome, affirmant qu'elle avait empoisonné l'eau bénite. La police put ainsi pénétrer dans l'église et l'arrêter.
Il s'ensuivit, en 1659, un procès retentissant qui s'acheva par plusieurs condamnations à mort, dont celle de Girolama Spara, dite l'« Astrologa della Lungara[7] ». Par la suite, 41 autres femmes furent condamnées à mort, étranglées dans leurs cachots, voire emmurées sur ordre de l'Inquisition[8].
Sa mort
[modifier | modifier le code]Sous la torture, elle admit qu'elle avait vendu entre 1633 et 1651 à Rome pendant l'épidémie de peste - ce qui rendait encore plus difficile l'identification des empoisonnements -, assez de poison pour tuer 600 personnes[4],[9].
Giulia Tofana se justifie en déclarant que sa concoction est venue en aide à des femmes malheureuses et opprimées. Giulia Tofana est finalement exécutée à Rome en au Campo de' Fiori avec Girolama Spera, ainsi que trois apprenties.
Après sa mort, son corps est jeté par-dessus le mur de son église refuge. Certains utilisateurs et fournisseurs sont également arrêtés et exécutés, tandis que d'autres complices sont enfermés dans les cachots du palais Pucci.
Les confusions
[modifier | modifier le code]Une autre version de sa biographie semble néanmoins incorrecte[10]: Giulia Tofana serait parvenue à échapper à la justice et se serait réfugiée dans un couvent à Naples. Confondue plusieurs années après, elle aurait été torturée puis condamnée à mort par strangulation à Naples en 1719.
La légende selon laquelle Wolfgang Amadeus Mozart aurait été empoisonné à l'aide de l'Aqua Tofana est infondée[11].
Giulia Tofana est dans de nombreuses sources confondue avec Hieronyma Spara, La Spara, une femme exerçant la même activité au même endroit, à la même époque, et également surnommée l'« Astrologa della Lungara », ce qui s'explique par le regroupement local des professions.
Références
[modifier | modifier le code]- Stefania Bonura, les 101 femmes les plus méchantes de l'histoire. Héroïnes obscures, misérables, perdues et diaboliques, Rome, Newton Compton, 2011, chap. 36.
- Monson, Craig A.: The Black Widows of the Eternal City: The True Story of Rome’s Most Infamous poisoners
- « AQUA-TOFANA : Définition de AQUA-TOFANA », sur www.cnrtl.fr (consulté le )
- « Giulia Tofana, l'empoisonneuse de Palerme : la meurtrière la plus prolifique de l'Histoire ! », sur hitek.fr, (consulté le )
- Giuseppa Granà, Giulia Tofana, belle à mourir , sur Eco Internazionale , 19 février 2020
- Dans sa Vie d'Alexandre VII, le cardinal Pietro Sforza Pallavicino (1607-1667), évoque l'officine de Giulia Tofana, via della Penitenza, comme une « silencieuse boucherie des maris ».
- La Via della Lungara est une rue de Rome qui relie la Via di Porta Settimiana et la Piazza della Rovere, dans le Rione Trastevere.
- cf Giulia Tofana, la donna che uccise oltre 600 mariti.
- Néanmoins cela ne peut être confirmé avec certitude en raison d'aveux obtenus sous la torture et de la généralisation de ll'utilisation des poisons, de manière tant consciente qu'inconsciente à cette époque.
- Mike Dash, "Aqua Tofana: Slow-Poisoning and Husband-Killing in 17th Century Italy." A Blast From the Past, 6 avril 2015.
- Revue musicale de Suisse Romande,
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- le Cardinal Pallavicini, Vita di Alessandro VII.
- (it) Adriana Assini, Giulia Tofana. Gli amori, i veleni, Scrittura&Scritture, , 240 p. (ISBN 978-88-89682-96-8).
- David C Stuart, Dangereux Jardin, Frances Lincoln ltd, .
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :